A Lyon, la bataille des data centers a commencé
Ces infrastructures hautement sécurisées se sont multipliées au fil des années. En effet, il y a dix ans la Métropole lyonnaise comptait seulement 1 centre de données contre 14 aujourd’hui. Derrière ce nouveau marché se livre une bataille financière féroce.
La preuve en est : DCforData a inauguré son nouveau DC il y a à peine quelques mois dans le 8ᵉ arrondissement de Lyon. Avec une surface de 4 000 m² et déjà deux salles en service, « Rock » est l’un des plus gros de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Ses clients sont principalement des collectivités, des grosses entreprises ou encore des sociétés de service du numérique de la région. Mais l’objectif est également d’attirer des firmes nationales voire mondiales.
En effet, d’après Nicolas Pitance, président de DCforData, « Lyon se trouve sur une énorme artère Télécom. Tout le monde connaît le tunnel de Fourvière ou la gare de la Part-Dieu, hé bien il existe également une artère Télécom du nord au sud de l’Europe en direction de Marseille. » Une opinion nuancée par Samuel Triolet, directeur de Rezopole, « Lyon n’est pas dans une position géographique idéale […] Paris, c’est la France, alors on comprend son attrait. A Marseille, de nombreuses fibres trans-méditérranéennes et trans-océaniques partent vers l’Afrique, le Moyen-Orient et l’Asie. Mais à Lyon, il n’y a aucun effet d’aspiration similaire ».
Cependant, l’intérêt de stocker ces serveurs localement est bien réel. D’un point de vue pratique tout d’abord, puisqu’une intervention technique sera bien plus facile et rapide si le centre de données est situé à proximité de l’entreprise. Ensuite, cela permet de réduire de façon considérable le temps de latence et le délai de transmission des données dans un univers où la protection des données est de plus en plus importante. Et enfin, la mutualisation des infrastructures permet aux entreprises de réaliser des économies. « C’est important pour les sociétés françaises d’héberger leurs services sur le territoire national car c’est un hébergement souverain : les entreprises restent soumises à une législation française de contrôle des données, c’est-à-dire une législation plus sévère qu’aux États-Unis et leur Patrioct Act » confirme Cyrille Frantz Honegger, directeur des relations régionales de SFR. Ce géant des Télécoms détient le data center « Net Center » implanté à Vénissieux sur une surface de 7 000 m².
Toutefois une autre menace pèse sur les entreprises : le hacking et le vol de données.
« Le data center protège des intrusions de personnes dans le bâtiment. Mais ce sont les gens qui exploitent les serveurs qui gèrent la sécurité informatique […] Des tentatives d’intrusions par des hackers, même nous on en bloque en permanence ! » explique Hervé Gilquin, chercheur en mathématiques appliquées et en charge d’un DC à l’Ecole Nationale Supérieure de Lyon. Cette école et d’autres institutions publiques ont quant à elles fait le choix de stocker en interne. Depuis 2017, L’ENS possède son propre centre de données raccordé au réseau Renater, réseau de télécommunication de la recherche, afin de garder au plus proche les données produites. « Les chercheurs font du développement, il faut bricoler quotidiennement sur les lieux, et avec tous les calculs que nous réalisons nos serveurs sont en activité permanente, ce serait trop coûteux pour nous d’externaliser » ajoute Hervé Gilquin.
En effet, ces DC et l’exigence qui en découle coûtent très cher. Les propriétaires de ces centres comptent sur des investissements privés et publics même si ces derniers sont assez récents. « La Métropole a mis du temps à comprendre l’intérêt économique d’un data center […] Pendant des années, les acteurs économiques lyonnais étaient persuadés que ça ne créait pas d’emploi. Mais sans data center au niveau local, les boîtes vont d’abord exporter leur gestion informatique, puis la finance, puis le marketing et finalement les ventes » détaille Samuel Triolet. Nicolas Pitance, quant à lui, ironise « Disons que ce n’est pas aussi visible et vendeur qu’un stade de foot ».
Un changement de cap stratégique puisque selon une étude réalisée par Cisco, la capacité de stockage des centres de données devrait encore être multipliée par 2 d’ici 2021. De quoi accroître encore davantage les ambitions des entreprises de ce secteur...
Source : Médiacités