Une page se tourne pour le Cloud souverain français
Le Cloudwatt, service d’hébergement de données en ligne d’Orange, sera débranché le 1er février prochain. Lancée en 2012, il s’agissait de l’une des deux têtes du Cloud souverain à la française cofinancée à perte par l’argent public. Bercy appelant de nouveau à la création de centres de données sécurisés pour héberger les données sensibles de l’administration et des entreprises, cet échec pourrait servir de leçon
À l’origine de ce projet, baptisé Andromède, la France souhaitait investir 150 millions d’euros dans un service de serveurs mutualisés pouvant réduire les coûts des ministères et des entreprises. Mais voilà, les groupes de technologie français appelés à l’aide n’ont pas réussi à s’entendre et ont donc partagé l’enveloppe.
D’un côté, Cloudwatt a été créé par Orange et Thales en ajoutant 150 millions d’euros à la somme prévue par l’État. De l’autre côté, Numergy a été lancé par SFR et Bull avec le même investissement. Cependant aucun d’entre eux n’a su trouver de clients. Et deux ans après leur démarrage, Cloudwatt revendiquait seulement 2 millions de recettes. Même si Numergy s’en sortait mieux avec 6 millions facturés, il s’agit de miettes face à Amazon, Microsoft et IBM.
Bercy arrête les frais, quelques mois plus tard, en assurant n’avoir dépensé que la moitié des sommes promis. Orange et SFR rachètent alors les parts de l’État, de Thales pour l’un, de Bull pour l’autre. Numergy et Cloudwatt, devenues alors de simples marques, vivotaient depuis au sein des offres conçues pour les grandes entreprises par les deux opérateurs Télécoms.
Aujourd’hui, la domination sur le marché de l’informatique en ligne des acteurs américains nourrit toujours des craintes sur l’intégrité des données stratégiques. Un récent rapport du député Raphaël Gauvain critique le Cloud Act, une loi extraterritoriale américaine rappelant le Patriot Act et des programmes d’espionnage.
Le Gouvernement devrait donc signer un contrat stratégique de filière visant à faire émerger un écosystème du « Cloud de confiance » à l’automne. Être Français ne suffira pas pour en être et certaines technologies américaines ou chinoises utilisées dans des centres de données français seront difficilement compatibles.
« Cette fois, on ne présumera pas de la nationalité des acteurs mais de leurs capacités à garantir l’intégrité des données au regard de nos lois et de l’autonomie stratégique sur nos infrastructures essentielles et nos données », note Jean-Noël de Galzain, le président d'Hexatrust siégeant au comité stratégique de filière. De plus, l'Etat devrait s’engager à jouer son rôle d’acheteur.
Source : Les Echos